Mettre en pièce(s)
2016
Ce sont des corps qui décident d'abandonner quelque chose, d'opérer une soustraction, de se décharger, pour tenter de jouer un acte qui leur permette de sortir d'un habitus, d'un lieu de leurs propres corps. À un commencement correspond une rupture subjective, une conversion, un choix d'existence et ce choix n'est pas exempt d'une certaine violence. Je voudrais ici questionner cette violence à travers les corps de six danseurs et écrire une danse qui fasse l'épreuve du gouffre qui sépare parfois les mots des actes. Ma visée n'est pas de proposer une solution mais simplement de parler d'insistance : il me semble nécessaire de reconduire la danse à un point trop souvent évacué qui est celui de l'acte. J'ai besoin de parler de la violence de cet engagement et de la questionner avec nos propres corps.
Finalement, tenter d'interroger quelque chose qui est inscrit aux origines de notre théâtre et vers lequel je reviens sans cesse.
Pour parvenir à cet acte, nous n'hésiterons pas à travailler sur la répétition de mêmes séquences afin d'atteindre une charge suffisante et permettre alors au mouvement de sortir d'un flux, de proposer une expérience.
Une expérience qui n'a pas peur de se confronter aux murs de notre propre théâtre sur lesquels les mots d'Outrage au public de Peter Handke viennent comme transpirer notre propre mouvement et suinter dans notre espace de jeu. Un texte comme une pierre d'achoppement contre laquelle nous lançons nos propres corps pour vérifier notre centre de gravité, aujourd'hui. Ici, il s'agit moins d'un groupe, que de corps, qui, individuellement, œuvrent pour inventer leur propre rituel. Se croisant sur un même plateau, ils interagissent à différents moments dans leurs parcours pour affirmer leur présence et définir leur engagement.