Premier mouvement – le proscenium
Un corps debout, qui vient peut-être du public, du choeur, ou peut-être est-ce le coryphée, s’avance. Il est souvent de dos et engage une incantation physique et musicale au plateau vide, aux rideaux immobiles, à l’espace abandonné. Une incantation où le corps et la voix se partagent un message archaïque pour que quelque chose advienne, apparaisse, enfin.

Deuxième mouvement – le lointain
Le rideau se déforme, un corps gonfle les plis, déforme les lignes. Il est sur le seuil, il va franchir et répondre à cet appel. La limite du possible est franchie, sacrifice des formes, dans l’abondance de leurs surgissements imprévisibles.

Troisième mouvement – le plateau
Le corps apparaît. Il est enfin là dans l’espace. La vision peut s’accomplir et un dialogue avec le proscenium s’engage. La danse s’écrit alors avec un vocabulaire lié au corps même de cette vision, donc appartenant aussi au corps du choeur/spectateur. Une vision qui révèlerait de plus en plus sa charge, sa détermination, sa réalité. Une photo mouvante qui se rapprocherait de nous comme un focus sur ce corps révélé.

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Ces dernières années j’ai mené différents workshops et ateliers au cours desquels j’ai développé avec les danseurs participants, un module de travail comme une sorte d’accélérateur de rencontres et de questionnements, partant d’un accessoire qui se trouve dans les studios de danse, le rideau devant le miroir. Un rideau qui ne cesserait de nous faire entrevoir, dans ses franchissements successifs, le reflet de nos propres attentes.
Je ressens aujourd’hui la nécessité d’approfondir et de transposer l’expérimentation à la scène. Une personne proche du public appelle la présence d’un corps situé derrière le rideau. Ce corps apparaît, investit l’espace puis le rejoint dans une certaine proximité. Chaque apparition dure entre dix et quinze minutes et se déroule en trois mouvements.
Comment percevoir dans le corps d’un autre sa propre vision, et comment être la vision d’un autre corps? On pourrait dire cet endroit du passage entre désir et attente, entre ce corps seul sur le plateau et ce corps nombreux et multiple qui regarde, écoute et appelle.

Cinq fois.
Une fois pour sentir.
Une fois pour apercevoir.
Une fois pour oublier.
Une fois pour redécouvrir.
Une fois pour être avec.